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Département de Géographie

École normale supérieure

Compte-rendu réalisé par Burgel Élias, Chaniac Arnaud, Messador Marion, Roland Émilie, Sun Léo

À la confluence des eaux séquaniennes et des eaux salées de la Manche, la ville du Havre jouxte la Seine après un parcours fluvial de 777 km depuis le plateau de Langres (Côte d’Or) jusqu’à la façade maritime normande. Située en fond d’estuaire, Rouen fait figure cité complémentaire et concurrente. Entre les deux villes normandes s’étend un immense espace où alternent forêts, zones marécageuses et parcelles cultivées : la Seine y serpente sur 123km. Navigable, la vallée de la Seine relie Paris à sa façade maritime et à Port2000, premier port français en termes de trafic de conteneurs.

Photographie ci-dessous : Bassin du port du Havre. Photographie Marion Messador, 2014

Cet espace estuarien constitue une véritable mosaïque où les activités humaines et les espaces naturels fragiles cohabitent et se superposent. Des zones protégées aux qualités écosystémiques et paysagères reconnues par les institutions de protection de l’environnement, comme le marais Vernier, jouxtent l’immense infrastructure industrielle du port. À côté des raffineries de Total, on trouve par des roselières où nichent les butors étoilés. Pour autant, l’opposition entre espaces anthropisés et espaces naturels (ou présentés comme tels) n’est pas si nette qu’il n’y paraît. L’espace a été profondément artificialisé. Le fleuve est canalisé et contrôlé par un système d’écluses pour éviter de désastreuses inondations et permettre la navigation. L’estuaire a été creusé et aménagé pour permettre l’arrivée des bateaux et porte-conteneurs. Les marais eux-mêmes ne doivent leur aspect actuel qu’à une anthropisation ancienne : ils sont parcourus par des système de canaux de drainage, influencés par la tradition hollandaise, qui transforment les zones marécageuses en polders propices à l’activité agricole et conduisent à l’apparition d’un paysages, d’une faune et d’une flore très particuliers.

Si l’espace estuarien est un géosystème qui s’est mis en place dans le temps long, celui-ci n’en est pas moins soumis à des conflits dans le temps court. L’adaptation entre les activités humaines et le cadre biophysique est mouvant. Dans une logique de compétitivité, le port du Havre continue en effet de se développer pour assurer son rayonnement à l’échelle européenne et se placer en relais efficace d’une métropole parisienne qui doit, à l’instar d’autres villes de rang mondial comme Londres, renforcer ses liens avec sa façade maritime. Une telle ambition conduit inévitablement à la destruction de zones humides. Source de pollution, les activités portuaires transforment les paysages, perturbent les équilibres écologiques, à l’heure où la protection de l’environnement devient un objectif incontournable pour tous les acteurs du territoire, sous la pression des lois françaises et européennes et des stratégies de marketing territorial.

Dans ce contexte, des acteurs au poids et à la visibilité variables s’affrontent ou collaborent. Pour comprendre la fabrique de l’espace dans l’estuaire de la Seine, il faut donc s’intéresser à sa mise en discours et interroger les rapports de pouvoirs qui les sous-tendent. L’écologue, le maire du Havre, le représentant de Total, l’agriculteur du marais Vernier, le conseiller scientifique du Conservatoire du littoral : tous ces acteurs poursuivent des buts différents, mais tous doivent partager le même espace, le même champ (de lutte). Dans ce contexte, la question environnementale apparaît centrale pour comprendre les ajustements entre les activités humaines et les ressources naturelles. Il s’agit de se départir d’une vision enchantée. Aucune démarche n’étant totalement désintéressée, la protection durable du l’estuaire n’est généralement qu’un objectif secondaire toujours potentiellement sacrifiable à des activités rentables ou n’étant vraiment prise au sérieux par tous les acteurs que lorsqu’elle devient nécessaire à la survie de ces activités elle-mêmes.

Représentatif des enjeux présents dans de nombreux estuaires, le Havre est une sorte de laboratoire de la gestion environnementale, semble trouver une forme d’équilibre dans une logique de troc spatial dont il s’agira ici de décrire les structures et de cerner les limites.

Plan

  1. Les conséquences environnementales de l’extension du port
  2. La protection de l’environnement dans l’estuaire
  3. La protection de l’estuaire : acteurs et outils
  4. Quel bilan pour cette écologie industrielle ?

Bibliographie

 Ouvrages / Articles généraux sur l’environnement :

  • VERGER F., Les zones humides du littoral français, 2009, 400 p.
  •  LAIGLE L. et TUAL M., « Conceptions des inégalités écologiques dans cinq pays européens : quelle place dans les politiques de développement urbain durable ? », Développement durable et territoires [En ligne], Dossier 9 | 2007, mis en ligne le 02 septembre 2007, consulté le 18 août 2014. URL : http:// developpementdurable.revues.org
  • LARRÈRE C. et LARRÈRE R. Du bon usage de la nature. Pour une philosophie de l’environnement, Paris : Aubier, 1997.
  • GAFS M. ET FAVREAU J., « Diversité des logiques de fonctionnement et durabilité des exploitations en agriculture biologique », Économie Rurale, 339-440, 129-43, 2014.
  • FLEURY P., CHAZOULE C. et PEIGNE J., « Ruptures et transversalités entre agriculture biologique et agriculture de conservation », Économie Rurale, 339-340, 95-112, 2014.
  • ALAVOINE-MORNAS F. et MADELRIEUX S., « Passages à l’agriculture biologique : Une diversité de processus », Économie Rurale, 339-340, 65-79, 2014.
  • CARDONA A., « Le développement de l’agriculture biologique : effets directs et indirects dans le monde agricole et non agricole : Une enquête en Île-de-France », Économie Rurale, 339-440, 183-9, 20144.
  • SWYNGEDOUW E., « The antinomies of the postpolitical city : in search of a democratic politics of envi-ronmental production », International Journal of Urban and Regional Research, 33, 3, 601-20, 2009.

 

Ouvrages / Articles monographiques

 

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